Fivette un jour, Fivette toujours

Tu étais ma copine de galère, celle avec laquelle j’ai mené une partie de cette guerre et perdu de si nombreuses batailles.
On s’est connues sur ce forum où on était surnommées « les Fivette » et j’avais alors choisi de me cacher derrière un prénom qui n’était pas le mien, celui que je rêve depuis des années de donner à une fille.
A cette période-là de ma vie, je passais justement mon temps à me cacher derrière une fausse Moi.
Pendant longtemps j’ai souffert de façon anonyme. Mais jamais seule.
D’une part mon mari était inévitablement avec moi dans ce combat pour devenir parent, mais je t’avais aussi TOI.

Notre première rencontre « visuelle », c’était il y a deux ans, à la même période.
On était même allées regarder les vitrines de Noël ensemble, tentant d’apporter un peu de gaieté et de magie à notre vie.
Et puis on était toutes les deux, on se donnait de la force.

Je t’ai avouée ce jour-là ma plus grande crainte vis-à-vis de notre nouvelle amitié.
Celle de tomber enceinte avant toi.

J’appréhendais le jour où notre relation changerait.
Car il fallait se rendre à l’évidence, tôt ou tard, on arriverait au bout de notre p…..n de combat, et on risquerait alors de se délaisser.
Je ne voulais pas que cela nous atteigne.
Alors, j’espérais de tout coeur que ce soit toi qui tombe enceinte en premier.
Car je savais que si c’était le cas, j’aurais été vraiment heureuse pour toi, sans aucune tristesse derrière. Je savais que tu étais l’une des rares personnes à pouvoir m’annoncer cela sans me blesser, car tu méritais cette grossesse plus que quiconque.

Je savais que je pourrais encaisser. J’avais vécu pire.
« Pire » n’est pas le mot forcément adéquat, je le conçois, car on dirait que je parle d’un triste événement. Bien évidemment qu’attendre un enfant est la plus merveilleuse des nouvelles, mais je vivais pourtant tellement mal au fond de moi ces annonces de grossesse ou de naissance qui fleurissaient tout autour.

Cela me renvoyait à ce que j’étais alors. Cette femme infertile, presque inutile.
C’était comme ça que je me sentais. Inutile, incapable.
MOI, je n’y arrivais PAS.
TOUJOURS PAS.

Un jour de mai 2015, mon mal-être était si fort qu’il m’a poussée à m’inscrire sur ce forum, pour partager mon vécu avec d’autres femmes subissant le même sort.
J’avais alors tellement besoin de soutien. De vrai soutien. Sincère et pur, avec une profonde empathie.
Je ne pouvais pas vraiment le trouver ailleurs que sur ce site dédié à l’infertilité.
Je savais qu’ici je ne serais ni incomprise, ni jugée.

Nous avons donc commencé à échanger, puis de fil en aiguille nos messages sont devenus de plus en plus réguliers et intimes.
Désormais nous étions ensemble, à partager notre douleur.

Pendant des mois et des mois, nous nous sommes accompagnées l’une l’autre dans notre parcours du combattant.
Un lien étroit et surprenant s’était tissé, et avait fait de nous deux drôles de copines.
Rien n’était pourtant destiné à ce que l’on se rencontre.
Nous venions de deux villes différentes, nous avions deux métiers différents, deux âges différents, deux cultures différentes…
Mais notre envie de devenir mère nous rapprochait plus que tout.

Nous avions cette âme de guerrière, nous nous appelions tendrement les Warriors d’ailleurs, et nous vivions notre épreuve avec le même état d’esprit.
On croyait tellement en Dieu, même si nous ne priions pas le même.
On avait cette capacité à se relever vite de nos échecs et à prendre du recul sur nos souffrances.
Et quand le moral n’était clairement pas au rendez-vous, on se réconfortait et se reboostait.
Ainsi, on ne se laissait jamais aller puisque même quand nous nous sentions parfois au fond du gouffre, nous nous devions toujours de remonter à la surface et de trouver la force pour soutenir l’autre.
Bref, nous nous étions trouvées.

C’est toi qui es finalement tombée enceinte en premier.

Et je me souviens encore de la joie que j’ai ressentie lorsque tu me l’as annoncé.
J’étais tellement heureuse et émue pour toi ! Pas l’ombre d’un sentiment négatif.
J’étais pour une fois totalement transportée par cette merveilleuse nouvelle.

Et finalement, très peu de temps après, c’était à mon tour…
On a alors chacune vécu notre grossesse à notre manière.
Tu avais tes convictions, tes principes, et je les comprenais totalement.
De mon côté, une fois la peur des débuts mise de côté, je me suis laissée porter, et je suis devenue totalement épanouie dans mon nouveau corps de femme.
Je portais la vie, et cette vie que je portais était un tel miracle !

Malgré nos appels, nos messages, malgré notre sincère affection, nous ne sommes pas parvenues à nous voir ni enceintes, ni depuis qu’on est devenues maman.

Pourtant, j’ai tellement pensé à toi.
Et encore maintenant comme tu le vois. Ce texte en est la preuve.

Alors, certes nos routes se sont quelque peu séparées depuis la victoire tant attendue…
Mais sache que tu as laissé une trace indélébile sur mon chemin.
Et que tu fais partie à jamais de mon histoire.

Avec toute ma tendresse,

Ta copine de galère, ta warrior

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