Cet été-là…

C’était l’été.
On était en voyage sur une île de rêve mais pourtant je vivais un cauchemar.
Mes larmes coulaient en même temps que mon sang.

Il n’y avait plus de doute.
Je t’avais bel et bien perdu, toi, le seul espoir que j’avais pu avoir.
Le seul qui avait réussi ne serait-ce que quelques jours à s’accrocher à moi.

Même pas eu le temps de voir ce fameux plus sur le test de grossesse.
Quand j’y pense, c’est une chose qui ne m’est jamais arrivée et qui n’arrivera sans doute jamais.
Les tests pipi faits dans l’euphorie, ça n’est pas pour moi.
Pour moi c’est l’attente interminable des résultats d’une prise de sang, et le cœur qui bat la chamade durant ces jours de doute insoutenables.

Mais cet été-là, je ne savais pas encore l’épreuve qui nous attendait.
On était plus ou moins au début de nos essais.
Pourtant, mon insouciance m’avait déjà quelque peu quittée.

Car mon instinct ne me trompe rarement pour ne pas dire jamais.
J’ai finalement vite compris qu’avoir un enfant serait un parcours du combattant…

Pendant plusieurs jours, j’ai senti que j’étais enceinte.
Mon corps m’envoyait des signaux qui ne trompaient pas.
Je le savais, mon intuition était la bonne : je portais la vie.
J’ai à peine eu le temps de planer que j’ai aussitôt dû redescendre de mon nuage.
Ce petit embryon s’était décroché très rapidement après. Trop rapidement.
Je n’avais même pas eu le temps de le voir sur cet écran noir…

Cette fausse couche aurait pu passer inaperçue si je ne connaissais pas si bien mon corps. Ce corps qui ne m’aime pas et qui me le fait savoir.

En fait, le jour où j’ai réellement pris conscience que j’avais été enceinte et que ce futur bébé avec lequel je m’imaginais déjà s’était envolé, c’était sur cette île sans hôpital et dont le seul médecin était le pire que j’avais vu.
Quelques semaines avant notre départ, j’avais déjà compris que quelque chose d’anormal s’était passé.
En plein repas de famille, un mal de ventre de chien, et cette couleur pétante qui m’aveuglait.
Personne hormis mon mari ne l’a su ce jour-là.
J’avais réussi à enfiler mon costume de Wonderwomen et avais gardé cela pour moi.
Je pleurais donc intérieurement, mais si intensément.

Mon rêve s’était de nouveau écroulé pour cette fois…
Puis, je n’étais pas totalement sûre de ce qui était arrivé. C’était peut-être juste le début d’un nouveau cycle et peut-être que mon envie si forte d’avoir un enfant m’avait poussée à imaginer le ressenti de certains symptômes.

Mais non.
J’ai eu la confirmation que tu avais bel et bien existé, toi ce petit brybry que j’attendais.
On appelle cela une fausse couche précoce. Et la plupart du temps, on ne s’en rend même pas compte qu’on en fait une.
Avec mon intuition de dingue, cela ne pouvait être le cas.

Cette épreuve-ci, de nombreuses femmes la connaissent et n’en parlent pas.
On vit avec, un point c’est tout.
Mais même si dans notre tête on avance et on tente d’oublier, notre cœur, lui, nous le rappelle à jamais.

Mais comme d’habitude, j’ai pris du recul et relativisé.
J’ai pensé à toutes celles qui ont l’impression que leur ventre est devenu un cimetière.
J’ai pensé à ceux qui vivent donc de véritables drames dans l’ombre, à eux, ces discrets endeuillés, dont j’admire le courage.

C’est l’été.
Nous ne sommes plus sur une île de rêve mais j’ai pourtant l’impression d’en vivre un.
Le cauchemar est loin.
Enfin, pas tout à fait non plus.
Mais peu importe puisque je t’ai toi, mon fils, à mes côtés, et cela suffit pour me faire tout oublier…

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